Sur la route du Mans
La nouvelle saison d’endurance a déjà commencé. La
Entre
Rendez-vous à Bahreïn pour les préparatifs de la saison. Il est presque minuit. La
Ce sont Alexander Hitzinger et son équipe qui ont mis en œuvre cette théorie de l’évolution. Il ne s’agissait cependant pas simplement d’ajuster quelques boulons, mais de conserver le concept de base tout en repensant chaque détail. La 919 Hybrid dispose cette année encore d’un moteur turbo downsizé à injection directe d’essence et de deux systèmes distincts de récupération de l’énergie. La puissance du système a été portée à près de 1 000 ch (735 kW). La liste des améliorations est longue.
La combustion haute efficacité du moteur 4 cylindres de 2 litres, encore plus léger et plus rigide, a été optimisée. La force motrice du moteur en V à 90° dans le châssis a été également optimisée grâce à des modifications de la géométrie qui améliorent la rigidité de l’ensemble. Une double sortie d’échappement vient améliorer la puissance et l’efficacité aérodynamique en remplacement du système d’échappement centralisé. Le moteur thermique entraîne le train arrière avec une puissance nettement supérieure à 500 ch (368 kW). Même la boîte séquentielle de compétition à 7 rapports, à commande hydraulique, les ingénieurs ont réussi l’exploit de la rendre à la fois plus légère, plus rigide et plus robuste. « Nous avons également réduit le temps de passage de rapport », complète Alexander Hitzinger.
Surcroît de puissance et poids réduit, tel est le résultat du travail de perfectionnement effectué sur le système hybride. Sur le train avant, l’énergie cinétique au freinage est transformée en énergie électrique. Le second système de récupération de l’énergie se situe sur la sortie d’échappement. Les gaz d’échappement entraînent une turbine, presqu’en même temps que le turbocompresseur. Le courant ainsi produit est stocké, tout comme celui des freins avant, dans une batterie lithium-ion. Le pilote peut alors utiliser l’énergie stockée à son gré. Lorsqu’il utilise le booster à son maximum, la puissance supplémentaire dont il dispose est de l’ordre de 400 ch (294 kW), de quoi le coller à son siège. Cette énergie entraîne un moteur électrique situé sur l’essieu avant, ce qui fait alors de la 919 une voiture à transmission intégrale.
Tout comme pour le concept de motorisation, le règlement du Championnat du Monde laisse les ingénieurs entièrement libres de leur choix pour le mode de stockage. « Il faut donc opter pour celui qui est le plus adapté au système hybride choisi », explique Alexander Hitzinger. « C’est une question de dosage entre densité de puissance et densité énergétique. » Plus la densité de puissance du mode de stockage est élevée, plus vite l’énergie peut être acheminée et utilisée. Plus la densité énergétique est élevée, plus on peut stocker d’énergie. Les lois de la physique empêchent d’avoir le maximum pour les deux grandeurs. « Notre batterie lithium-ion atteint presque la densité de puissance d’un supercondensateur, mais avec une densité énergétique bien plus importante. Capable d’accumuler et de fournir une puissance élevée rapidement, elle est d’un poids minime et affiche une capacité de stockage relativement importante. »
Quant à l’utilisation de l’énergie électrique, elle est laissée à la libre appréciation des pilotes. Un pilote qui utiliserait quasiment toute la capacité du booster pendant un tour dans un duel avec un autre concurrent prendrait le risque d’être distancé dans une ligne droite par un pilote qui aurait encore de la réserve. Plus la quantité d’énergie électrique par tour dont dispose un pilote est élevée, moins il peut utiliser d’essence. C’est ainsi que le règlement entend encourager les innovations en matière de technologie hybride, mais aussi assurer l’égalité des chances entre les différents concepts de motorisation. En 2015, la
La caisse monocoque en fibres de carbone à structure sandwich est fabriquée en une seule pièce au lieu de deux, gagnant ainsi considérablement en légèreté, mais aussi en rigidité. « C’est une innovation permise par l’amélioration de la structure en couches », explique le directeur technique. Pas question de faire le moindre compromis en matière de sécurité. La stratégie a déjà payé : à peine une demi-heure avant la première victoire de la devancière, lors de l’ultime manche du Championnat du Monde d’Endurance 2014 au Brésil, Mark Webber est sorti pratiquement indemne d’un accident spectaculaire.
En matière d’aérodynamique, l’objectif est non seulement l’efficacité, mais aussi la sensibilité : moindre prise au vent, angles de braquage, de glissement, de roulis réduits. Ces facteurs modifient la trajectoire du vent sur la voiture, nuisant à la stabilité de la voiture et à la vitesse. En principe, les ingénieurs tentent de jouer sur deux tableaux : les longues lignes droites du Mans nécessitent une faible résistance au vent afin de réduire la portance négative au minimum requis. Mais les autres circuits exigent une portance négative plus importante.
Le moteur rugit à nouveau. Avec son double échappement, la 919 émet un timbre encore plus profond. Nico Hülkenberg enclenche la septième, appuie sur le booster et soulève un tourbillon de poussière. Marc Lieb, pilote chevronné à l’âme d’ingénieur passionné, observe le nuage. Que ressent-il à l’idée de se présenter au volant de cette nouvelle
Texte Heike Hientzsch
Photos Jürgen Tap
Neuf atouts
Les trois équipages doivent être à la hauteur d’exigences élevées.
Les trois trios de l’an dernier restent inchangés : Timo Bernhard (Allemagne), Brendon Hartley (Nouvelle-Zélande) et Mark Webber (Australie) se partagent le volant de la numéro 17. La voiture 18 est confiée à Romain Dumas (France), Neel Jani (Suisse) et Marc Lieb (Allemagne). À Spa et au Mans courra un troisième prototype floqué du numéro 19, piloté par Earl Bamber (Nouvelle-Zélande), Nico Hülkenberg (Allemagne) et Nick Tandy (Royaume-Uni).
Fritz Enzinger, directeur du programme LMP1, a toute confiance dans ces neuf pilotes. « Chacun est à la fois rapide et vif, bien sûr, mais pour le WEC, en particulier au Mans, il faut avoir d’autres atouts : une concentration de tous les instants et des performances hors du commun sont incontournables. Et puis il faut être capable de s’intégrer à une équipe soudée. Lorsque des voitures s’agglutinent sur le circuit, il faut être patient pour doubler les voitures les plus lentes. Ce sport n’est pas fait pour jouer en solo. »