Des modèles au top
Si l’on peut reproduire en Lego des galaxies entières, pourquoi pas l’univers de
Malte Dorowski a parfois l’air absent au petit-déjeuner. Au début, à voir son regard perdu au loin, sa femme se demandait si tout allait bien, nous confie-t-il avec un sourire timide qui semble demander pardon. Mais Mme Dorowski ne se fait plus de souci. Elle sait que son mari est confronté à un problème crucial : doit-il utiliser les défenses d’éléphant comme élargisseur de voie au niveau des passages de roue ? Étrange, mais vrai.
Après ces réflexions, Malte se rend au travail. Mais le soir, il met immédiatement à l’épreuve l’idée des défenses d’éléphant. Pour cela, il a une pièce à part, une pièce… pleine de Lego. Depuis leur invention par un menuisier danois à la fin des années 1940, des enfants du monde entier ont grandi avec ces briques de plastique multicolores. Bien plus qu’un jeu, les Lego sont l’objet d’un véritable culte.
Concepteur médias de formation, Malte (32 ans) travaille pour un grand portail Web dans le nord de l’Allemagne. S’il est officiellement directeur marketing, le jeune homme reste plutôt en retrait. Avec sa barbe de trois jours, son pull à capuche et ses baskets passe-partout, seule sa silhouette dégingandée pourrait peut-être attirer l’attention – à moins que ce ne soit le bonheur enfantin qu’il a su préserver dans sa vie d’adulte… Après avoir construit tous les modèles de voitures Lego existants, Malte Dorowski s’est lassé d’assembler le moindre camion de pompier en suivant les instructions fournies. Il s’était assez fait la main comme ça. Il est donc passé aux
En quatre ans, Malte a construit plus de 30 modèles de
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Lego séduit les enfants avec des modèles à construire sans cesse renouvelés, autour de thématiques les plus diverses : les plongeurs, les pirates, les robots, les super-héros… Malte pioche dans tous ces univers : il utilise les harpons noirs des plongeurs comme essuie-glace, le crochet du pirate est parfait pour fixer l’arceau de sécurité et la fenêtre de prison a déjà servi de châssis pour accueillir le siège baquet…
Pour se livrer à sa passion, il lui suffit de peu : une pièce vide, un bureau et comme unique outil, des brucelles. Les pièces sont rangées par forme dans une vingtaine de boîtes de plastique transparent ou, pour les plus petites, dans des range-couverts. Parfois, Malte retourne chercher chez ses parents une pièce particulière qui doit être restée dans sa chambre et dont il a besoin. Par exemple, pour le dessus du tableau de bord : « C’était une cape noire de super-héros, de Batman, je crois. »
Les véritables artistes Lego constituent une sorte de guilde internationale ; ils participent à des expositions et publient des photos de leurs créations sur l’Internet. Dans ce petit monde, Malte Dorowski est une star. On lui demande sans cesse des instructions de montage, parfois contre rémunération. Mais ces pratiques sont contraires à l’éthique des créateurs, et de plus, le plan de la
Plutôt que de vendre un plan tout fait, il préfère bidouiller jusqu’à avoir la capote de cabriolet parfaite, qu’on peut même plier et ranger – encore le fruit de ses méditations du petit-déjeuner. L’autre sujet de ses réflexions est l’aboutissement naturel de sa marotte : construire un musée
Malte Dorowski a amené ses modèles préférés au studio photo. Avant d’immortaliser son œuvre, il époussette délicatement une suspension, appuie doucement sur un aileron arrière. S’il donne la même attention à sa progéniture, alors son fils n’est certainement pas à plaindre. Paul, un an et demi, est bien sûr déjà entouré de Lego, mais seulement de gros Duplo, mieux adaptés aux mains des tout-petits. Le père se fait déjà du souci : que va-t-il se passer quand il sera assez grand pour les vrais Lego ? Pourra-t-il rentrer dans la pièce de son père, au risque de tout déranger, ou même de faire tomber la 917 KH (queue courte) rouge, qui explosera en mille morceaux (1 523 plus précisément) ? Malte reste confiant : « Il va falloir que je trouve une solution. »
Texte Johannes Schweikle
Photos Steffen Jahn
Souhaitez-vous voir comment Malte Dorowski construit la