Descendre ? Non merci !
Dijon. Avec la 911 GT3 RS,
Ça, c’est du sport automobile ! Quand deux moteurs vrombissent pour la victoire sur le circuit de Dijon. Quand l’odeur d’huile, d’essence et de pneus flotte dans l’atmosphère. Quand les ailerons s’alignent dans la voie des stands. L’un d’eux attire l’œil plus que les autres : difficile d’imaginer un bolide homologué pour la route qui aurait l’aileron plus large que la 911 GT3 RS. Mais ce ne sont pas ses seuls atouts : les fentes d’air de refroidissement à l’avant, les sorties d’air sur les ailes avant, et les puissantes échappées d’air sur les passages de roues arrière parachèvent son look on ne peut plus dynamique. À côté, la 911 GT3 a presque l’air civile. Elle aussi est dotée de plusieurs détails aérodynamiques, mais nettement plus discrets. Fera-t-elle malgré tout le poids sur le circuit ?
C’est parti : les deux beautés sortent des stands, direction la piste. Dès le premier freinage dans l’approche du virage double droite, la GT3 annonce la couleur : elle n’est pas là pour jouer les figurantes. La sportive grise freine puissamment en abordant le virage, s’agrippe avec dextérité dans le tournant, puis réaccélère avec véhémence dans la brève ligne droite qui suit. Elle prend les virages en S comme un jeu, puis après un gauche en épingle à cheveux, s’engage dans la ligne droite qui mène à la parabolique. C’est l’occasion, pour le moteur 3,8 litres, de montrer ce qu’il a dans le ventre en faisant ce pour quoi il a été créé : tourner. 7 000, 8 000. À 8 500 tr/min, le Boxer semble puiser dans ses dernières réserves. Mais la vitesse supérieure est passée à 9 000 tr/min, et le spectacle recommence.
Celui d’un moteur qui ne produit pas seulement une poussée phénoménale, mais aussi d’intenses moments de bonheur. Porté par la symphonie de la ligne d’admission et de l’échappement, le conducteur n’a qu’une envie : se surpasser.
Encore une fois, freinage sec, puis un long virage à droite, et enfin, le circuit vallonné débouche à nouveau sur la dernière ligne droite. Ouf, on respire ! Bilan : un bolide du rang de la GT3 ne peut pas avoir de véritable rival sur un circuit aussi rapide que celui de Dijon. Ou peut-être que si ? Le petit bijou qui sort des stands à cet instant va peut-être apporter la preuve du contraire. Avec son puissant aileron, la 911 GT3 RS emboîte le pas de son illustre parente.
La puissance ne fait pas tout
La 911 GT3 RS n’affiche que 25 chevaux de plus que sa grande sœur. Mais ce n’est qu’une demi-vérité. La GT3 RS a une cylindrée de 4 litres : un vrai plus, qui lui donne une nervosité encore plus affirmée. Dans les côtes, notamment. Sur ce circuit rapide, avec ses nombreuses courbes, la GT3 RS est dans son élément. Son grand aileron et son avant remodelé pour encore plus d’aérodynamisme lui confèrent une force descensionnelle maximale ; presque autant que pour la GT3 Cup, réservée à la compétition. Avec sa largeur de châssis optimisée sur les essieux avant et arrière, la 911 GT3 RS présente une stabilité étonnante. Or la stabilité donne de la confiance. Et la confiance est source de rapidité !
Le charisme de la GT3 RS ne vient cependant pas de la pure vitesse. Son charme s’explique avant tout par sa nature épurée, sans artifices, qui incarne la quintessence de l’idée de la GT3. Même si l’on a du mal à l’imaginer, compte tenu de ses précédents : tout, dans cette voiture, semble être encore plus précis, plus spontané, plus direct. C’est une machine qui répond instantanément aux moindres pensées de celui qui la pilote. La conduite aux limites se transforme en expérience pédagogique ; il ne se passe rien d’inattendu, et rien ne se produit sans raison. À chaque tour de circuit, on s’améliore, on devient plus rapide, jusqu’à l’extase absolue. Aucune autre voiture de sport n’offre une expérience semblable à celle que procure la GT3 RS.
Au cœur de l’action
La GT3 comme la GT3 RS sont équipées d’une boîte PDK sept rapports. Celle-ci a été retravaillée pour la GT3 RS : les palettes de commande sont légèrement plus rigides, le rapport final a été subtilement raccourci. La spontanéité augmente encore d’un cran. Mais les deux moteurs ont un point commun : la boîte PDK passe d’une vitesse à l’autre avec une rapidité fascinante, réagit instantanément à la manipulation de la palette, et éclipse à coup sûr n’importe quel embrayage manuel. En actionnant les palettes ou le levier de sélection, on obtient une sensation sportive maximale, et on est assuré de rester au cœur de l’action.
Il y a quelques années, cela aurait été une hérésie, mais désormais, il n’y a plus aucun problème à rouler en mode automatique sur un circuit. Le système rétrograde en toute fiabilité dans les zones où il faut freiner, et choisit les rapports les plus adaptés mieux que ne le ferait le conducteur lui-même. Pour celui-ci, cela signifie plus de disponibilité pour le circuit, et plus de capacité à savourer la sensation GT3. Car oui, hélas, l’heure où il faut quitter la piste finit toujours par arriver.
Radical ou…encore plus radical ?
Laquelle des deux voitures est la plus rapide ? C’est sûr, la GT3 RS peut tirer avantage de sa cylindrée, de son aérodynamisme amélioré et de ses pneus plus larges, qu’elle convertit directement en meilleurs temps au tour. Dans les passages rapides, elle démontre qu’elle est encore plus proche du sport automobile. La GT3 n’en prend pas un coup de vieux pour autant. Il lui faut tout simplement plus d’implication du conducteur pour ne pas se laisser distancer par la GT3 RS.
Mais à la fin de la journée se pose une autre question, au moins aussi importante : laquelle procure le plus de plaisir ? C’est un principe du sport automobile que de faire rimer plaisir avec rapidité. Le concept radical, le répondant subtil et le son encore plus resserré de la GT3 RS donnent la chair de poule. Descendre ? Non merci ! La GT3 procure les mêmes palpitations, quoique sous une forme légèrement moins prégnante. Et sur un point, elle a même une longueur d’avance sur sa sœur plus puissante : son régime maximal, de 9 000 tr/min, conserve une aura magique, et c’est sur le circuit qu’on en sent tout le potentiel.
Il ne nous reste plus qu’à reprendre la route, départ de Dijon pour le Centre
Texte Philipp Aeberli
Photos Dirk Michael Deckbar